Les mots surlignés font l'objet d'une note
1Reçue à Grenoble, le 15 mars 1573.
2Monseigneur, je n’ay vollu faillir vous advertir coment monsieur de Rosset feust
3partir quatre vingt soldatz de ma compagnie et mon enseigne qu’il leur
6commandoit dans ung basteau, avec quelques mariniers et chappuys qui ont
7mis en pièces tout ce qu’ilz ont treuvé. Mon enseigne a desmeuré une petite heure
8dans les fauxbours attendant s’ilz faysoient poinct de sorties pour entrer
9pelle melle avec eux, mais ilz n’ont jamais heu le ceur de sortir, vous
10assurant monseigneur que s’il heussent faict que ledict Pouzin n’eust pas cousté
11beaucoup de le reprendre. Ilz ont tiré quelques arquebusades et muscquetades
12aultre de ceulx qui mettoient en pièces les bateaulx. Monsieur de Rousset me
14promist qu’il y seroict aller cent ou six-vingts arquebusiers du cousté de Vert mais
15qu’il n’aict pas esté prest ormis que deux soldatz qu’il a baillié à mon enseigne
16au bor de l’eau qui sont monté sur le basteau que j’avois faict descendre, qui
17scavoit les lieux où les batteaulx estoint. Je crois que je vous avois desjà
18escrit comme j’avois faict rompre ceux là de Soyon. Il y a trois ou quatre
19jours tellement qu’ilz n’ont aulcung basteau qu’il puisse apparoistre au bor
20de l’eau ny en aultre lieu que je sache. Monsieur le mareschal n’a rien encores
21faict à Sommières. Il n’y aultre nouvelles qui merite vous escripre. L’on m’a adverty
22aujourdhuy que les huguenaulx hont retournés devant Challançon et vont assiegé.
23Toutesfoys je ne vous en puis encores bien asseurer descripvant la presente. J’ay
24receu la lettre qu’il vous a pleu m’escripre par monsieur de Chapponnay, ensemble
25une couppie des bonnes nouvelles qu’avez receu de La Rochelle. Je vous supplieray
26mon seigneur avoir souvenance de ma compagnie parce que le moys estre de main
27et les soldatz sont si très pauvres qu’ils n’ont moyen de vivres attendu la cheretié
28qui est, et sont contrainct la pluspart engager touttes leurs ardes. Je suis
29bien marry quant je n’ay moyen de leur prester ce qu’il leur seroict necessaire
30en leur nourriture mais je n’ay pas de quoy le faire. Pourquoy je vous suplie
31ne treuver mauvais si je vous en importune, m’estant engaigé à Lyon pour armer
32madicte compagnie, n’ayant pas receu ung liard des soldatz de mesdictes
33armes parce qu’ilz n’eussent pas heu moyen de vivre au lieu où nous sommes.
34J’ey faict mettre dans les prisons une douzaine des principaulx et muttins
35de ceste ville et les aultres ressarer dans leur maison. Pourquoy il vous
36plaira m’en escripre votre bonne vollenté. L’occasion du faict est que j’eu heu
37de quelque lieu avertissement qu’ilz ont intelligence en ceste ville qui est
38cause que je couche d’ordinayre au corps de garde vu par la ville
39[307v°] pour obvyer à leurs malheureuses entreprises comme j’espère à l’ayde de Dieu en faire. Attendant
40voz commandementz je supplierey le Createur,
41monseigneur qu’il vous preserve en bonne prosperité, heureuse vie et longue.
42De Vallance ce trèsiesme mars 1573.
43Votre très humble et très obeysant
44serviteur à jamays
45Le Mestral